En matière de succession, bien souvent, l’appétit financier des héritiers se manifeste par des querelles relatives au fait que l’un des héritiers est davantage gratifié que les autres.
La Cour de Cassation, Chambre Criminelle (n° 18-87082), a rendu le 27 novembre 2019 un Arrêt très intéressant.
En l’espèce, une vieille dame rédige un testament.
Elle est mère de deux enfants, une fille et un garçon.
Le testament est un acte effectué ou non devant un Notaire par lequel son rédacteur, le testateur, répartit son patrimoine (biens et droits) entre différents bénéficiaires.
Le testament prend effet au décès du testateur, qui peut le modifier à tout moment via un testament postérieur.
Pour prendre effet, le testament doit avoir été rédigé dans les conditions prévues par la Loi.
Aux termes de ce testament, la vieille dame décide de gratifier davantage son fils par rapport à sa fille.
Fait important, au moment de la rédaction du testament, la vieille dame était placée sous curatelle.
La vieille dame décède.
Lors des opérations de liquidation de la succession, la fille prend connaissance du testament de sa mère et découvre avec stupeur que cette dernière a attribué à son frère un certain nombre de biens.
La fille de la défunte décide de porter plainte pour abus de faiblesse contre son frère.
Une instruction judiciaire est ouverte.
Le Juge d’Instruction rend une Ordonnance de Non-Lieu.
Cela signifie que le frère n’est pas poursuivi devant une juridiction pénale.
La sœur interjette appel de l’Ordonnance de Non-Lieu.
La Chambre de l’Instruction (Cour d’Appel) donne raison une fois de plus au frère.
La sœur décide d’aller jusqu’au bout du processus judiciaire et inscrit un Pourvoi en Cassation.
Là encore, la sœur n’obtiendra pas gain de cause.
L’Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation du 27 novembre 2019 (n° 18-87082) apporte des précisions très importantes.
De prime abord on pourrait se dire que la vieille dame étant placée sous curatelle au moment de la rédaction du testament, elle était nécessairement une personne faible, vulnérable et qu’il y avait une altération de son discernement.
Ce n’est pas l’avis de la Chambre Criminelle.
En effet, il ne suffit pas de constater la faiblesse d’une personne en raison de sa vulnérabilité, de son âge ou d’une déficience physique ou psychique pour caractériser l’abus de faiblesse.
La déficience physique ou psychique doit entraîner l’altération du discernement du majeur et l’empêcher d’exprimer sa volonté librement et clairement.
EN CONCLUSION :
La mise en place d’une mesure de protection ne permet pas à elle seule d’en conclure que le majeur présente nécessairement une altération du discernement et donc l’existence de l’abus de faiblesse.
Ainsi, quand bien même le testateur est placé sous une mesure de protection, cela ne signifie pas nécessairement une absence de discernement et donc un abus de faiblesse.
Il convient donc de bien dissocier l’altération du discernement et l’abus de faiblesse à l’encontre du majeur protégé.
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